Cher lecteur,
Dans son alerte du 12 février, Jim nous expliquait que la contagion du coronavirus s’était infiltrée dans certaines sociétés dont la chaine d’approvisionnement et les ventes finales dépendent de la Chine.
Lundi soir, en rentrant de leur week-end prolongé (le « President Day » est un jour férié aux Etats-Unis), les investisseurs ont appris qu’en raison de l’impact actuel du coronavirus, le géant Apple signalait qu’il n’atteindrait pas ses prévisions initiales de 63 à 67 Mds$, concernant le trimestre clos fin mars.
Apple est affecté par la perturbation de sa chaîne d’approvisionnement et par l’effondrement de la demande de ses produits en Chine.
Et notre dernière recommandation, Seagate Technology PLC (NASDAQ : STX), s’expose à un choc similaire. Ces chocs proviendront à la fois de sa chaîne d’approvisionnement et de la baisse de la demande en faveur des disques durs, en Chine.
Les dirigeants d’Apple ont considéré qu’ils devaient revoir à la baisse leurs prévisions, moins de trois semaines après les avoir publiées fin janvier !
Si une société aussi prépondérante et bien informée qu’Apple ignorait l’ampleur de l’impact du coronavirus sur le trimestre clos fin mars, alors une société de la taille de Seagate ne devrait avoir aucune confiance à l’égard de ses résultats à court terme.
Les dirigeants de Seagate ont annoncé leurs prévisions il y a deux semaines, alors il est fort probable qu’elles soient revues à la baisse au cours des semaines à venir. Lors de la conférence téléphonique du 4 février commentant les résultats, la direction a déclaré que le coronavirus n’aurait aucun impact concret sur le trimestre clos fin mars.
Voici ce qu’a déclaré le directeur financier, Gianluca Romano :
« Dans un contexte où l’épidémie de coronavirus se poursuit, nous plaçons en tête de nos priorités le bien-être et la santé de nos employés et partenaires. Nous travaillons également avec nos fournisseurs afin de satisfaire la demande des clients et réduire les risques sur la production. Même si nous ne prévoyons pas d’impact financier sur le trimestre clos fin mars, actuellement, il demeure énormément d’incertitudes. Par conséquent, nous élargissons les fourchettes de nos prévisions de chiffre d’affaires et de bénéfices par action. »
Je le répète, la direction a déclaré que le coronavirus n’aurait « aucun impact financier concret sur le trimestre clos en mars ». Comme il est clair que les effets du virus sur l’économie chinoise se sont considérablement aggravés depuis le 4 février, le marché ne devrait pas trop se fier aux résultats de Seagate.
Les bouleversements liés au coronavirus surviennent à un moment où l’activité phare de Seagate n’en finit pas de décliner.
Ce graphique, provenant de Koyfin, retrace notamment le chiffre d’affaires réalisé par Seagate ces douze derniers mois (barres bleues). Vous noterez que le chiffre d’affaires a enregistré un pic de 16,33 Mds$ au cours de l’exercice s’achevant en décembre 2012. Depuis, le chiffre d’affaires a diminué de 39%, pour atteindre 9,96 Mds$ (« Revs LTM ») seulement :
Cliquez sur l’image pour l’afficher en grand. Source : Koyfin
Le chiffre d’affaires de Seagate chute depuis plusieurs années. Et ce parce qu’il est trop étroitement lié aux ventes de disques durs HDD, une technologie devenant progressivement obsolète. Les disques HDD, qui comportent des composantes magnétiques et des pièces mobiles, ont tendance à être défaillants au bout d’un certain temps d’utilisation.
Ces dernières années, la tendance a évolué vers une diminution du chiffre d’affaires lié aux disques HDD grande capacité. Et même si la demande mondiale en faveur de supports de stockage progresse systématiquement, elle est plus que contrebalancée par la chute des prix de vente unitaires.
Le prix unitaire des disques HDD chute sans cesse. Le Prix/To (téraoctet) annoncé par Seagate a baissé de 41 $ à 33 $ puis 30 $ – respectivement – entre les exercices s’achevant en juin 2017, 2018 et 2019. Les prix ont chuté à 23 $/To au trimestre clos le 3 janvier 2020.
Par conséquent, le prix unitaire du produit phare de Seagate a été littéralement divisé par deux, en moins de trois ans !
C’est remarquable. Il est difficile de demeurer rentable, en tant que producteur, dans un contexte aussi déflationniste.
Plus remarquable encore, le formulaire de déclaration 10-K de Seagate signale une « modeste » érosion des prix entre les exercices 2017 et 2019.
Selon cette déclaration, les baisses de prix ont tendance à être encore plus spectaculaires dans les cas suivants :
– en période de contraction économique, contexte où les concurrents peuvent recourir aux rabais pour tenter de préserver des parts de marchés, ou de s’en emparer ;
– lorsque peu de nouveautés sont lancées, alors que les concurrents offrent des produits comparables ou d’autres solutions ;
– et lorsque l’offre dépasse la demande dans le secteur.
Les disques durs SSD offrent des performance plus élevées et sont bien plus rapides que les HDD. Ils ne contiennent aucune pièce mobile et ont moins de chances d’être défaillants.
Le coût/bit des SSD est également en baisse. Par conséquent, les fabricants de matériel informatique pour particuliers et entreprises intègrent de plus en plus de SSD dans les PC, les ordinateurs portables et les serveurs.
On pourrait penser qu’un chiffre d’affaires annuel affichant une tendance baissière aussi puissante et systématique, inciterait les investisseurs à baisser l’évaluation de Seagate.
Pourtant, comme l’indique la ligne rouge du graphique de Koyfin, ci-dessus, le ratio valeur d’entreprise (VE)/chiffre d’affaires (CA) de Seagate se rapproche d’un plus haut historique d’environ 1,7.
Si le ratio VE/CA de Seagate retournait à sa moyenne à long terme de 1, l’action STX chuterait à 30 $, ce qui correspondrait à un krach de 45% par rapport à son niveau actuel. Cela se rapproche davantage d’une estimation prudente de la valeur intrinsèque de l’action, et cela ne tient même pas compte d’une récession mondiale. En cas de récession, le multiple serait encore plus bas.
Bref, les actions STX peuvent encore énormément chuter.
Les trades baissiers sur STX, recommandés le 11 février par Gaël, notre analyste, sont plutôt bien partis.
Nous les suivrons et vous enverrons une alerte le cas échéant.
Bien à vous,
Dan Amoss, CFA
Analyste