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Alerte n°19 – Les conditions sont réunies pour qu’un krach se produise

Par 6 septembre 2019Alertes

Dan Amoss

Cher lecteur,

Les krachs de marché sont rares. Mais, dans un contexte particulier, associant certaines conditions, un krach de marché a de grandes chances de se produire.

Si vous connaissez ces conditions et que vous les surveillez de près, cela peut vous aider à vous y préparer, en modifiant votre portefeuille et en le faisant passer en mode « défensif au maximum ».

Ce portefeuille « défensif au maximum » devrait contenir peu d’actions et peu d’obligations d’entreprises. Il doit présenter des compartiments supplémentaires contenant des liquidités, de l’or et des bons du Trésor américain.

Les conditions sont réunies pour qu’un krach se produise, voici pourquoi :

  • Les actions sont surévaluées ;

  • Le dernier cycle de resserrement de la Fed, qui a pris fin en décembre 2018, pénalise toujours l’économie avec un certain décalage ;

  • L’appétit pour le risque des investisseurs (tel que mesuré par les indicateurs de momentum et de balance directionnelle des marchés du marché actions) est en train de diminuer.

Mais – et c’est peut-être le plus important – dix années d’achats sur les replis, en étant convaincu que le stimulus de la banque centrale ferait toujours remonter les actions, ont incité la plupart des investisseurs à faire preuve d’un dangereux excès de confiance.

Les haussiers (bulls) du marché actions ont tendance à penser de la même façon. Ils agissent de manière synchronisée. Or, quand l’état d’esprit change brutalement et que les bulls deviennent prudents, les cours peuvent nettement chuter.

Dans Aftermath, le livre que Jim vient de publier, il explique le concept « d’hypersynchronisme ». Il s’agit d’une situation de marché où la plupart des acteurs ont des stratégies et attentes similaires au cours des mois précédant les krachs.

A l’approche d’un pic de marché, la pensée de groupe et le comportement grégaire sont invasifs. Un nombre instable d’investisseurs s’est engouffré comme un seul homme sur une classe d’actifs. Ces investisseurs espèrent vendre à d’autres investisseurs ayant peut-être une philosophie semblable, mais dont l’appétit pour le risque est encore plus aiguisé.

Le contexte actuel du marché actions semble très hypersynchrone. Au bout de dix ans de marché haussier porté par les actions phares et les plus chères, la majeure partie des actifs est passée chez les gérants de fonds prenant le plus de risques, au détriment des gérants de fonds prudents.

Bon nombre de gérants de fonds prudents ont mis la clé sous la porte. Plus ils raisonnent de manière indépendante, plus leurs clients transfèrent rapidement leurs actifs vers des gérants qui courent après le momentum [NDLR : qui suivent la tendance], et passent pour les plus intelligents vers la fin du marché haussier.

Voici comment ce phénomène fragilise de plus en plus le marché : moins les gérants de fonds peuvent raisonner et agir indépendamment, selon leur meilleur jugement, moins le marché actions devient efficient.

Un marché actions efficient exige un ensemble d’acteurs manifestant différentes philosophies et opinions. Si la plupart des autres acteurs de marché se sont précipités sur les mêmes stratégies et trades, on peut se retrouver avec un marché actions qui enregistre de nouveaux plus-hauts historiques tout en devenant de plus en plus vulnérable.

« Les marchés sont désormais confrontés à un mélange nocif de passivité, de prolifération de produits, d’automatisation et de réactions comportementales instables », écrit Jim. « Cette accumulation de facteurs de risque est totalement nouvelle et se situe hors du champ d’expérience de tout trader ou analyste quantitatif » (les « quants« ).

Les traders et les quants n’ont aucun équivalent historique pouvant s’intégrer parfaitement dans leurs modèles de trading algorithmique. La plupart des quants ont conscience de cette pénurie d’équivalents historiques, alors ils la compensent en modifiant légèrement – constamment – les données de leurs modèles, afin de correspondre à ce qui a fonctionné au cours d’une histoire récente.

Dans un contexte où un si grand nombre de quants affluent sur des tendances qui « fonctionnent », cela finit par produire une pensée de groupe à très grande échelle. C’est un type d’hypersynchronisme.

Si certains nouveaux facteurs surprenants (comme une déclaration surprise de la part d’une banque centrale) modifient soudain les attentes, sur un marché hypersynchrone, alors il ne faut pas s’étonner qu’un krach se produise.

Pour notre Moniteur de Krach, les indicateurs de momentum du S&P 500 sont un facteur important. La comparaison des cours par rapport à une moyenne mobile sur 36 mois est l’un des indicateurs de momentum que nous surveillons.

La ligne bleue, sur le graphique ci-dessous, indique la moyenne mobile du S&P 500 sur 36 mois.

Elle affiche une pente positive (ascendante ) depuis début 2011. Une pente positive est un signe de marché haussier. En outre, cette moyenne mobile a servi de support lors de trois plus-bas de marché cruciaux : fin 2011, début 2016 et fin 2018.

Dans chaque cas, le S&P 500 a failli chuter au-dessous de sa moyenne mobile sur 36 mois, mais il a rebondi nettement en un mois ou deux.

Cours du S&P500

Au printemps 2008, le S&P 500 a chuté de façon décisive au-dessous de cette moyenne mobile. Cela signalait que le momentum à long terme s’était retourné et qu’un marché baissier, potentiellement vaste, avait débuté. A cette époque, la Fed a assoupli activement sa politique en abaissant les taux. Mais cet assouplissement a peu importé car l’accumulation antérieure de créances douteuses était si vaste et invasive qu’un krach a été inévitable.

Hier, jeudi, le S&P 500 a clôturé à 2 976 points. Alors il suffirait d’une baisse de 11,6%, seulement, à partir de là, pour qu’il tombe au-dessous de cette importante moyenne mobile.

L’analyse technique du marché actions va bien au-delà des moyennes mobiles et des lignes de support. Elle intègre également les indicateurs de balance directionnelle des marchés. Nous prenons en compte des indicateurs de volume tels que :

  • Le nombre de nouveaux plus hauts sur 52 semaines par rapport au nombre de nouveaux plus bas sur 52 semaines ;

  • La NYSE Advance-Decline Line (direction du marché) ;

  • Les divergences entre les cours des obligations d’entreprises et les cours des actions.

Les deux premières séries de données nous indiquent combien d’actions participent aux rallys et aux sell-offs de marché. Si un marché a opéré un rally rassemblant une large participation, ce rally a tendance à être solide. Ce fait pourrait faire passer notre Moniteur de Krach à un niveau plus positif.

D’un autre côté, si un sell-off se produit sur un large éventail d’actions, en créant de multiples nouveaux plus bas sur 52 semaines, alors notre Moniteur de Krach passe à niveau plus négatif.

Le message que nous recevons en ce moment est négatif.

Par exemple sur l’indice NYSE Composite, le nombre de plus hauts enregistrés sur 52 semaines, a enregistré un pic à 230, en juin 2019. Les dernières données dont nous disposons au 30 août montrent que seules 97 actions de cet indice ont enregistré de nouveaux plus hauts.

Alors bien que les principaux indices se négocient approximativement au même niveau qu’en avril 2019, les volumes sont visiblement plus faibles.

De plus, contrairement aux deux précédents marchés baissiers de 2007-2008 et 2000-2002, on constate un comportement beaucoup plus « hypersynchrone » chez les investisseurs, plus de dettes d’entreprises et une confiance plus élevée que jamais vis-à-vis d’un « put de la Fed ».

Les marchés baissiers et les krachs ne se ressemblent jamais, et personne ne peut les prédire avec précision. Mais il existe des indicateurs capables de vous dire à quel moment les probabilités de krach sont élevées.

Or aujourd’hui, les probabilités de krach sont plus élevées que la moyenne.

Bien à vous,

Dan Amoss, CFA
Analyste

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