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Tesla, urbanisme et fin du monde

Par 23 septembre 2020Alertes

« La ville est arc-boutée sur le temps. »

– Paul Chemetov

Chère Lectrice, cher Lecteur,

00:00 Une paroi de calcaire attaquée par la mer, jour après jour, inlassablement. En apparence, rien ne change, tout va bien… mais, insensiblement, l’érosion fait son oeuvre… et petit à petit, la falaise s’effrite, se creuse et s’affaiblit.

Etretat

 

C’est à peu près ce qui semble en train de se passer dans le domaine boursier – mais cela prendra sans doute un peu moins de millénaires que l’érosion naturelle des falaises de Douvres.

00:30 Certes, les marchés continuent à reprendre des couleurs aujourd’hui, après la séance cauchemardesque de mardi… mais en sous-marin, au pied de la falaise, des forces de sape sont au travail – annonçant une mutation profonde des conditions boursières.

Bruno Bertez explique cela plus en détails dans La Chronique Agora :

« Une fenêtre de vulnérabilité s’est ouverte sur les marchés mondiaux. Le gestionnaire de fonds J.P. Hussman a publié à ce sujet une note très claire dans laquelle il expliquait que l’esprit de spéculation était en train de faiblir et que l’appétit pour le jeu mesuré par l’unanimité des marchés avait considérablement baissé.

Hussman énonçait ainsi ce que j’affirme très souvent, à savoir que, quand l’appétit pour le jeu est grand, les joueurs achètent indistinctement n’importe quoi et à tout prix ; en revanche, quand l’appétit pour le jeu faiblit et qu’ils sont rassasiés, ils chipotent et concentrent leurs achats sur une poignée de titres.

Cette perte d’appétit pour le jeu peut donc être décelée et chiffrée par des indicateurs dits d’unanimité ou de divergence. Quand l’unanimité est forte, l’appétit est grand ; quand les divergences se multiplient, l’appétit se réduit.

Nous étions donc il y a quelques semaines, clairement, dans l’une de ces phases. Cela signifie qu’une trappe de vulnérabilité propice à un trou d’air était ouverte. Bien entendu, il est difficile de fixer tout cela à un jour près, mais néanmoins, aussi bien Hussman que moi-même, un ou deux jours après lui, avons eu la chance d’être clairvoyants et d’exposer cette situation propice à un trou d’air. »

Ajoutez à cela une Fed dont les interventions sont de moins en moins efficaces, comme l’explique encore Bruno dans la suite de son article, et on obtient des intervenants qui se refroidissent, se calment… et pourraient même – gasp ! – commencer à réfléchir avant de foncer tête baissée sur la première valeur à la mode.

Cela pourrait siffler une sorte de « fin de partie » pour les marchés haussiers galopants… ou pas, me direz-vous : quand ils ont décidé d’être irrationnels, les intervenants ont du mal à changer d’avis – surtout quand des milliards de dollars d’argent facile sont déversés au quotidien dans le système.

01:25
Tout de même, il n’est pas interdit de se dire que le flop du « Battery Day » de Tesla, hier, illustre assez bien ce principe de marchés plus hésitants… et d’intervenants rechignant désormais à avaler de bon coeur toutes les couleuvres qu’on leur présente.

Explication d’Edern Rio dans Opportunités Technos :

« Elon Musk avait annoncé une journée mémorable qui resterait gravée dans le marbre de l’épopée de la voiture électrique et plus particulièrement de son plus bel héraut, Tesla. Nombre de commentateurs attendaient donc l’annonce d’une ‘million-mile battery, la batterie capable de durer 1 800 000 km.

Et pour cause, cela permettrait d’écarter un des talons d’Achille de la voiture électrique. Au bout d’un certain temps, il faut changer les batteries puisqu’elles ne se rechargent plus au maximum et perdent de leur capacité.

Las, encore une fois, le génial bateleur-en-chef de la tech a déçu : ‘il y a encore beaucoup de travail à faire’… ‘nous n’envisageons pas de production de masse avant 2030’… Le public […] a vendu en masse l’action TSLA qui repassait sous les 400 $ en after hours, rendant plus de 10 % sur la journée.

En effet, l’un des grands spécialistes de la batterie, le Chinois CATL, a déjà annoncé cette fameuse million-mile battery. Beaucoup espéraient un partenariat avec des entreprises qui développent des batteries à la pointe des technologies, mais ce n’est pas le chemin qu’a choisi Tesla.

Au contraire, Tesla a annoncé que son objectif était d’internaliser la production de ses batteries. »

Pas sûr que ce soit le bon itinéraire, continue Edern dans la suite de son article : si vous êtes fondu de nouvelles technologies, laissez Tesla de côté… et préférez-lui une valeur plus prometteuse, comme celle-ci, par exemple !

02:15 Restons dans les voitures et les tendances de fond, dans l’économie réelle cette fois-ci ; une nouvelle conséquence profonde de la pandémie de coronavirus, telle que décrite par Jim Rickards dans Intelligence Stratégique :

« Lorsqu’un analyste-type de Wall Street observe des données révélant que les ventes de voiture flambent (c’est le cas), il les intègre dans un modèle de régression obsolète et en conclut avec bonheur que la hausse des ventes de voitures signifie une hausse de la vente au détail, plus d’emplois, plus de revenus et une jolie reprise en forme de ‘V’ suivant la récession liée à la pandémie.

En fait, tout cela est absurde et montre à quel point Wall Street ne comprend pas ce qui se passe vraiment. Les ventes de voitures n’augmentent pas parce que l’économie repart sur les chapeaux sur roues. En fait, les faillites des petites entreprises et le chômage (y compris ceux qui ont renoncé à chercher un emploi) atteignent des niveaux jamais constatés depuis la Grande dépression.

Les ventes de voiture sont en progression car les gens fuient les villes.

Beaucoup de citadins ne possèdent pas de voiture : c’est cher et peu pratique à conserver en ville. A la place, ils ont recours aux services d’Uber, Lyft, aux transports publics, et louent des voitures lorsqu’ils doivent sortir de la ville.

Mais lorsqu’ils partent pour de bon, ils ont besoin de voitures pour circuler dans leurs nouvelles banlieues ou nouveaux lieux de résidence à la campagne. »

03:00 Selon Jim – dont l’analyse rejoint d’ailleurs celle de Bill Bonner dans La Chronique Agora – nous avons là affaire à une phénomène bien réel. Il continue :

« Cet article offre des données montrant de façon tangible ce mouvement migratoire hors des villes. Selon lui, 44% des personnes interrogées dans le cadre d’un sondage portant sur les plus riches habitants de New York envisagent de quitter la ville en raison à la fois de la pandémie et de l’augmentation du coût de la vie. L’enquête ne tient même pas compte de l’impact des émeutes et des incendies criminels intervenus récemment.

Bien entendu, ceux qui quittent la ville le plus facilement sont également ceux qui ont le plus d’argent, les revenus les plus élevés et le plus de talent. Autrement dit, ceux qui confèrent à la ville énormément de son bien-être économique et de sa vitalité. Les villes sont les plus grandes plateformes de création de richesse, dans l’histoire de la civilisation.

Les habitants des villes ont toujours fait un compromis entre, d’un côté, un coût de la vie élevé, des impôts locaux élevés et les embouteillages, et, de l’autre côté, un niveau culturel élevé, des musées, des théâtres, des restaurants prestigieux et le fait de rencontrer des gens talentueux et intelligents.

Or en ce moment, il ne reste que les coûts et les inconvénients et plus aucune stimulation ni aucun enthousiasme. Alors les riches et talentueux s’en vont.

Les villes sont en train d’être détruites. Et la civilisation dans son ensemble suivra sans tarder. »

Voilà, depuis le temps que nous l’annoncions, on y est : c’est la fin du monde !

BD Tintin
L’étoile mystérieuse, Hergé

04:00 Bon, votre correspondante doit avouer qu’elle n’est pas tout à fait d’accord avec ce point de vue.

Certes, les grandes villes sont en train de connaître une évolution spectaculaire – mais Paris, du haut de ses 15 siècles d’existence (à quelques décennies près), montre bien qu’il faut plus qu’une épidémie (sans parler d’un certain nombre de guerres, mondiales ou non) pour abattre une cité, sans parler d’une civilisation entière.

James Altucher propose pour sa part un scénario plus optimiste dans Investissements Personnels, en se projetant en l’an… 2084. Selon lui, d’ici une soixantaine d’année, voilà où en sera l’urbanisme mondial :

« Du fait de l’augmentation de la bande passante et de la facilité d’utilisation de Zoom, on n’aura plus besoin de remplir les immeubles de bureaux. On pourra vivre n’importe où et travailler dans un bureau virtuel ou dans Microsoft VROffice.

Avec moins de personnes et d’entreprises, les recettes fiscales s’effondreront en même temps que les déficits grimperont en flèche. Les maires des villes seront obligés de licencier des professeurs, des éboueurs, des agents de police, etc. Le crime augmentera fortement, les rues seront jonchées de détritus et, de ce fait, la fréquentation touristique chutera.

Les villes devront inventer d’autres moyens pour devenir à nouveau attractives. Par exemple, chaque ville créera sa propre crypto-monnaie. Ainsi, la ville de New York lancera le NYCBucks.

Tout le monde à NY touchera un revenu universel de base en NYCBucks (au lieu des dollars). Cette subvention sera calculée en fonction du nombre de jours passés en ville. On ne pourra dépenser ses NYCBucks que dans la ville de New York.

Pour chaque transaction effectuée, l’acheteur et le vendeur ‘mineront’ des micro NYCBucks en fonction de la taille de la transaction. Par exemple, pour 100 NYCBucks que vous minerez, vous pourrez les échanger contre 100 $ qui seront déduits de vos impôts locaux et nationaux.

Les touristes reviendront alors dans les villes, tout comme les entreprises. Ce qui attirera de fait plus de monde pour y vivre. Et les villes seront alors sauvées. »

J’admets… On est un peu dans la science-fiction (vous pouvez retrouver les autres « prévisions 2084 » de James par ici, d’ailleurs). Mais entre la vision de Jim et celle de James, l’humanité trouvera sans doute une troisième voie et continuera… comme toujours… de vivre et de s’adapter. Le tout, c’est de savoir quoi faire pendant que ces changements ont lieu – pour pouvoir en profiter au lieu de les subir !

Excellente soirée,

Françoise Garteiser
Les Marchés en 5 Minutes

PS : Ailleurs dans les bureaux… Jim Rickards (encore lui) et Gaël Deballe débouclent dans Crash Speculator une position sur un gain de près de 43% en un peu moins d’un mois… et toute l’équipe est sur le pont pour l’événement exceptionnel de ce dimanche : rendez-vous ci-dessous pour en savoir plus.

 

 

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