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Alerte n°108 – Pourquoi les conditions de marché sont-elles à l’opposé de celles de 2008 ?

Par 10 décembre 2020Alertes

Dan Amoss

Cher lecteur,

Les conditions de marché n’ont pratiquement jamais été aussi follement euphoriques qu’en ce moment.

Nous sommes en présence :

  • D’une nouvelle vague de traders inexpérimentés qui n’ont jamais connu un marché baissier.
  • D’investisseurs institutionnels qui se sentent obligés de courir après tout ce qui peut générer un rendement, dans un contexte où la banque centrale réprime les taux d’intérêt.
  • D’une demande en faveur d’options put protectrices se situant près d’un plus bas historique, par rapport à la demande d’options call spéculatives.
  • Et d’un marché actions où les cours ont grimpé si haut, par rapport aux bénéfices enregistrés, que les sociétés auront du mal à se montrer à la hauteur des attentes.

Bref, les conditions de marché sont à l’exact opposé de ce qu’elles étaient au plus fort du krach de 2008.

A l’époque, les vendeurs à découvert (« short sellers », les spéculations à la baisse) étaient assis sur des gains importants et renforçaient des positions short déjà considérables. Aujourd’hui, les vendeurs à découvert sont une espèce menacée.

Cela peut résonner comme une victoire, pour les haussiers, mais il n’en est rien. En période de marché baissier, les positions short exercent un frein, en quelque sorte, sur la pression vendeuse, car ceux qui détiennent ce type de position sont constamment sur le marché, et sont acheteurs d’actions qu’ils ont déjà vendues à découvert par le passé. Sans les vendeurs à découvert, un volume d’ordres qui penche trop côté vendeur peut amplifier un krach.

Ce graphique de Bloomberg montre que le volume d’actions vendues à découvert atteint un plus bas sur une génération, quasiment, et a nettement chuté en 2020.

Les ventes à découvert atteignent un plus bas record
Les baissiers disparaissent rapidement sur fond de rally des actions
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La ligne noire indique que le taux médian des ventes à découvert d’actions du S&P 500 est inférieur à 1,6% de la capitalisation boursière. Et ce chiffre bas date du 30 octobre, soit avant les rallys spectaculaires de novembre, que les vaccins contre le coronavirus ont provoqués. Actuellement, il est probablement bien plus faible.

Dans le même temps, l’indice S&P 500 s’expose toujours à un stress test en fin de mois, avec l’intégration du constructeur de véhicules électriques (« VE ») Tesla Inc. (NASDAQ : TSLA).

Dans notre dernier commentaire, Le « stress-test » imminent de Tesla sur le S&P 500, j’ai suggéré que l’on ne verrait peut-être plus jamais une société qui soit « à la fois aussi inconséquente au sein de l’économie réelle et aussi conséquente sur le marché actions que Tesla. A moins de considérer que les lois de l’économie et de la physique ont été révoquées, il n’est pas pertinent d’investir dans les actions Tesla, à leur cours actuel ».

Et pourtant, TSLA a poursuivi son rally.

L’équipe de direction de Tesla n’est pas aussi brillante que le consensus ne le pense, mais elle n’est pas stupide, non plus. Sa mission est de faire la promotion de son action, et non de gérer une entreprise rentable et créatrice de valeur.

En début de semaine, la direction a effectivement admis qu’elle ne gérait pas une entreprise qui s’autofinance. Alors le 8 décembre, elle a profité de la demande – apparemment perpétuelle – en faveur de ses actions, pour lancer une nouvelle vente de titres à hauteur de 5 Mds$, « au prix du marché ».

Cette somme est une goutte d’eau dans l’océan, comparée à la capitalisation boursière de Tesla, alors elle ne diluera pas trop l’actionnariat. Toutefois, elle va diminuer encore le rendement du capital investi, déjà misérablement faible, de l’entreprise.

Ce rendement, cumulé sur toute la durée d’existence de Tesla, est profondément négatif. Autrement dit, bien que Tesla ait plus de 12 ans et ait largement dépassé le stade de la start-up, l’entreprise consomme toujours bien plus de trésorerie qu’elle n’en produit.

En 2020, l’entreprise a englouti 10 Mds$ de capitaux des actionnaires pour les investir dans des usines et pour compenser ce qui sera – c’est presque certain – de futures pertes d’exploitation.

Ceux qui sont haussiers sur Tesla croient que la société a franchi un tournant et qu’elle sera rentable à l’avenir. Mais ils spéculent. Ils espèrent que cette décennie de faibles performances financières de l’entreprise ne va pas se muer qu’en performances médiocres mais bien spectaculaires, et ce de manière permanente.

Pour les dirigeants de Tesla, cet empressement à lever des capitaux auprès des actionnaires, en 2020, est une façon d’exprimer que l’entreprise demeure très cyclique, exposée à la concurrence et vorace de capitaux. Et ils raconteront certainement des histoires fantastiques sur la façon dont ces capitaux seront investis dans des projets de croissance. Mais ces histoires ont déjà été inlassablement rabâchées. Les résultats financiers concrets de cette société, mesurés en rendement du capital investi, se situent presque tout en bas de l’échelle du secteur industriel.

Je vais réitérer une prédiction formulée il y a deux semaines : « Une fois que TSLA sera intégrée à l’indice S&P 500, il se peut qu’on constate une pression à la vente aussi intense que la pression à l’achat de fin novembre. Mais tant que l’action ne sera pas enfin intégrée dans l’indice, on ne pourra pas savoir jusqu’où elle va grimper. »

Et c’est ce processus – très « disruptif » – d’intégration de TSLA au S&P 500 qui a suscité notre recommandation de trade du 2 décembre sur Charles Schwab Corp. (NYSE : SCHW). Jim a expliqué que le sort de Schwab, société de courtage et de gestion d’actifs, est lié au marché actions et à l’économie américaine.

En fin de mois, lorsque les gérants de fonds indiciels devront faire de la place dans leurs portefeuilles pour y caser la capitalisation surdimensionnée de Tesla, nous devrions constater peu d’achats, sur une courte période, sur les autres composantes du S&P 500.

SCHW fait partie des actions du S&P 500 qui s’exposent à ce contexte d’achats limités. Ce jour-là, le célèbre indice commencera à charrier son lourd fardeau, après avoir payé le prix d’une capitalisation énigmatiquement élevée pour intégrer l’une des entreprises les plus exagérément vantées, et vorace de capitaux, jamais rencontrée.

Le bon côté, c’est que cet épisode pourrait amener les investisseurs à réfléchir à deux fois avant de détenir des fonds indiciels quel que soit la composition et l’évaluation de l’indice. Si les indices sont prêts à détenir passivement des entreprises affichant des rendements bas et voraces en capitaux, et ce à des prix déconnectés de la réalité, alors l’indiciel représente-t-il vraiment un « investissement » ?

La plupart du temps, l’indiciel est bel et bien considéré comme un investissement. Mais dans les circonstances que nous constatons actuellement où, apparemment, tout le monde se situe du côté haussier de la barque, l’indiciel s’apparente plus à un pari spéculatif misant sur un volume illimité de futurs acheteurs.

Gaël, notre analyste, vous indiquera comment gérer vos positions sur SCHW.

Remarque :
Ce commentaire est le dernier de l’année 2020. Je serai de retour la première semaine de janvier 2021, avec mon prochain article. Mais restez attentif car nous vous adresserons au moins une nouvelle alerte d’achat la semaine prochaine, ainsi qu’une alerte si un ajustement est nécessaire sur notre position expirant le 18 décembre.

Je vous souhaite une excellente fin d’année !

Bien à vous,

Dan Amoss, CFA
Analyste

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